En lisant À l’ombre des chapeaux de paille [1], je me suis souvenu de cette réflexion entendue à la radio dans la bouche d’un historien : « Certains romans aident à connaître l’histoire plus que certains ouvrages d’historiens ». En effet, les romans historiques s’adressent à un public large et la trame romanesque permet une description vivante d’une époque.
Le roman historique de Colette Dahan restitue par ses choix de vocabulaire propre à des milieux, à des régions... le laborieux travail de documentation préalable à l’écriture. Son ouvrage situe les évènements dans leur territoire et leur temps. Il donne à voir les métiers, les soins d’une époque, la vie des forçats, le rôle des sœurs Saint Joseph ou la place de la prostitution à l’aube du XXe siècle.
En lisant, j’étais porté par l’histoire romanesque, rendue par un langage descriptif et une écriture soignée. J’étais avec « la Rose », cette jeune femme campagnarde du Doubs qui veut réaliser son rêve : devenir modiste et vendre ses chapeaux. Je l’ai suivie en ville dans sa découverte du monde, dans ses rencontres avec des personnes malhonnêtes mais protégées par leur statut social et la loi, dans ses relations avec celles et ceux qui surent l’aider dans les épreuves et ses démêlés avec la justice. J’étais également avec Hortence. devenue sœur Véronique. Cette autre jeune femme
découvrant ce qu’était la Relégation en Guyane et un monde que son milieu social n’avait pas préparée à rencontrer.

J’ai repensé à un autre livre, Passeport pour le Bagne [2], également publié par le Petit Pavé. Leur point commun : la condamnation au bagne de petites gens du peuple.
Celui-ci a été écrit par Odile Métais-Thoreau, une historienne. Son récit s’appuie sur les documents du procès et ses connaissances des bagnes. L’autrice y rend compte de l’histoire de Jacques Maurice, un p’tit gars comme bien d’autres qui, à 22 ans, est condamné au bagne pour tentative d’empoisonnement de son oncle et de sa tante. Un petit livre illustré de photos et de dessins dans lequel, l’autrice a su échapper à deux écueils. Celui d’une présentation journalistique d’un fait divers, ainsi qu’à l’approche misérabiliste d’une sottise de gredin victime de son conditionnement social et familial.
En peu de pages, l’historienne réussit à restituer les conditions de vie d’une famille de journalier tourangeau au milieu du 19ème siècle et à reconstituer l’histoire d’un mauvais p’tit drôle emporté dans une affaire où il est autant victime que coupable. Une histoire qui le verra terminer sa vie, quelques jours avant d’atteindre 26 ans, au bagne de Toulon.

Voir en complément Trois lectures du Petit Pavé

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