Histoire officielle, roman national et histoire populaire

lundi 30 décembre 2024
par  Paul MASSON
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« Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens,
les histoires de chasse ne peuvent que chanter la gloire du chasseur »
Proverbe africain.

Écrire l’histoire, c’est rendre compte, à un moment présent, d’évènements qui se sont déroulés dans le passé. L’histoire cherche à éclairer le présent par la connaissance du passé. Pour réaliser ce travail, historiens et historiennes sont amenés à faire des choix dans les évènements et les personnes dont ils vont parler et sont conduits à situer leur récit d’après un point de vue. Les mêmes évènements de la Révolution Française seront rendus différemment selon qu’ils sont écrits du point de vue de la Noblesse ou de celui du peuple de Paris.

L’histoire qu’on nous enseigne n’échappe pas à cette règle. En France, pour parler de la période qui commence à la fin du XIXe siècle et finit avec la guerre de 14-18, l’expression retenue par l’histoire officielle est la « Belle Époque ». Ce terme rend compte d’une période marquée par des avancées technologiques (électricité, automobile…), une augmentation de la production de richesses, une stabilité politique exceptionnelle sous la Troisième République et de nouvelles conquêtes coloniales en Afrique du Nord.
C’est effectivement une « belle époque » pour la bourgeoisie qui dirige le pays et profite des progrès économiques. Le terme est particulièrement approprié pour parler des populations qui, bénéficiant de l’accroissement des richesses, jouissent des raffinements de la vie oisive, des salons parisiens, des loisirs et activités sportives, ce petit monde bourgeois qui fréquente les stations balnéaires et va se ressourcer dans les villes d’eau.
Mais pour la grande majorité des françaises et des français le terme est inadapté et dissimule les conditions de vie des travailleurs et travailleuses. Pour les hommes et des femmes qui travaillent journellement dans les usines et les mines l’époque n’est pas belle. C’est à cette période que la classe ouvrière revendique la journée de 8 heures et se voit envoyer la troupe. Le 1er mai 1891, lors d’une manifestation festive à Fourmies (Nord), la fusillade fait neuf morts, dont deux enfants et trente-cinq blessés. Le samedi 10 mars 1906, dans la mine entre Courrières et Lens, (Pas de Calais), une explosion de grisou provoque la plus grande catastrophe minière. Bilan officiel :1 099 morts.
Dans les campagnes, l’époque n’est pas belle non plus. Le phylloxéra continue à sévir et la France connaît deux révoltes des vignerons : en 1907 dans le midi et quatre ans plus tard en Champagne.
Et le terme Belle Époque utilisé à « la gloire du chasseur » colonisateur, les peuples du Maghreb, nouvellement colonisés, ne peuvent le prendre à leur compte.

L’histoire est également propagée par le « roman national », une construction. Nos ancêtres ne sont pas les Gaulois, Charles Martel n’a pas arrêté les Arabes à Poitiers et les poilus ne sont pas partis à la guerre « la fleur au fusil » en 1914. Le roman national est un mythe, une image simplifiée et déformée de l’histoire, élaborée dans le temps en fonction des évènements et communément acceptée. Il a pour fonction de fournir une origine et une identité communes aux Françaises et aux Français, à donner une cohérence fondatrice à une communauté diverse et divisée.

Pour l’histoire populaire, voir ICI


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Histoire officielle et roman national

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