Photo-Souvenir

samedi 26 juillet 2008
par  Dominique Lauber
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Cette photo est prise dans une campagne désolée autour ...un chantier ; au premier plan, une herbe mal taillée dans laquelle je marche, faisant bien attention . Aux autres plans s’étagent un chemin de terre, une plate-bande d’herbe coupée, c’est là que commence ce qui ressemble à un chantier : un mur de béton, pas très haut, des piquets à intervalles réguliers, une pente, un plat, une autre pente et une rangée d’arbres rabougris, peut-être. La photo en noir et blanc donne un air triste à ce paysage qui est à ce que je vois notre lieu de promenade. Je dois avoir 2 ans, je suis donc accompagnée, on me laisse porter un sac en toile transparente presque aussi haut que moi ce qui ne facilite pas ma marche déjà précautionneuse. Je viens de baisser la tête par timidité car j’ai dû voir le photographe. Je suis une petite fille rondelette aux cheveux bruns, souples. Je porte une veste en laine claire et une drôle de jupe en gros drap brun, des chaussettes tricotées à la main et des chaussures montantes noires .
J’ai les 2 poings fermés, un sur l’effort que semble me demander la marche dans ce décor inhabituel, l’autre fermé sur l’anse du sac. Il y a quelque chose dans ce sac qui pèse un peu, quelque chose qui fait ombre...à la loupe, je crois voir ma poupée, Geneviève.

***

Je suis de là-bas :
Casablanca, murs blancs auréolés de poussière
Sable de la plage de Salé
ici, le souk, murs d’ombres, là-bas, le bled, Tamanrasset et l’oued
rires enfantins des fatmas, « Bouchra » au Jardin des Oudaïas
chants à l’église, pieds nus dans la mosquée
_éclair de soleil dans un cuivre abandonné dans la cuisine
mouches endiablées, voleur de tapis
cris dans la Koutoubia
voix rauques et crachats. Amdoulla !
Grands yeux sombres ourlés de noir
peau brune au henné, cheveux huilés
djellabas racornies, souillées, poussiéreuses
poudres orange, poivrées, épices sucrées, raisins, miel, thé
Fermée la porte bleue de Marrakech.

***

A 6 ans, je portais les cheveux longs jusqu’aux fesses
Fièrement
Tu les démêlais, les tirais en arrière
Energiquement
Je criais parfois ou souffrais
Silencieusement
Tu me faisais plus souvent une tresse épaisse
Sagement
J’avais mal à la tête, j’en perdais des poignées
Tristement
Tu soufflais, parlais de les couper
Sérieusement
J’avais une petite figure et ma tresse pesait
Dangereusement
Tu as fini par me convaincre
Finalement
J’acceptais par peur de devenir chauve
Bêtement
C’est arrivé comme ça
Insidieusement
La honte.

***

On ne sait pas combien de temps ça a duré, l’absence
Je ne sais plus combien de temps a duré le voyage
Tu ne m’as jamais dit le temps que tu passais, seule avec moi
Nous n’étions plus au temps de l’obéissance
peut-être à celui du mensonge
Quel est ce temps qui dura 1 seconde ou une éternité ? Le temps de la terreur
Voici venu le temps des questions sans réponses et de la déception
Quand bien même aurait-on le temps de se pencher sur son berceau...le ferait-on ?
Combien de temps encore le doute t’emprisonnera-t-il ?
J’ai pris le temps de laisser couler les histoires de ma vie comme le long des joues, des larmes gaies ou tristes .
Et toi, prendrais-tu le temps de mettre en mots l’enfance ?

Dominique


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