Nuit de pleine lune

jeudi 13 septembre 2007
par  Paul MASSON
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Cinq heures du matin, une lumière blanche enveloppe la terre. Une roche morte brille dans la nuit. La lune renvoie une lumière froide, éclaire la terre par effet miroir. Nulle vie sur ce corps céleste et pourtant, une énergie circule. L’astre du jour est là pendant la nuit, fantôme de lumière.

Toutes les lampes sont éteintes. Mes yeux se sont faits à l’obscurité nocturne, j’écris à la lueur de la lune. Mon esprit est aux rêves : autres formes, autres visions, autres émotions, autres fantasmes. Pierrot lunaire, ombre et lumière, spectacle en noir et blanc.

Quelques étoiles isolées ne parviennent pas à imposer leur présence dans ce ciel lunaire.

Des lambeaux de nuages, sortes de laine écrue cardée au peigne fin, voilent d’une ombre translucide le ciel blanc aux nuances de gris.

Devant moi, le silence de la nuit s’étale dans un décor en noir et blanc. Spectacle grandiose… à perte de vue, arbres et prairies entremêlées, collines, vallons, forêts, tâches sombres, ombre et lumière.

Dans les creux, géants de légende, trembles et peupliers sont posés là, immobiles, droits, silencieux. A leur pied, l’ombre mange la prairie ; tout est en nuance de gris : ligne d’horizon, masses sombres des arbres, taches claires des prairies.

Au loin, un halo de brume caresse le flan d’une colline. Tout près, la cime d’un cerisier ; pas le moindre frémissement dans les feuilles.

La nature semble complètement immobile. J’entends les cris secs et aigus d’une pipistrelle qui s’approche. Son passage rapide dans mon champ de vision avant de rejoindre la masse sombre d’où elle a surgi semble un désordre soudain.

Seuls, le chant permanent des grillons en bruit de fond, le hululement, à intervalles réguliers d’un oiseau de nuit et les meuglements répétés d’une vache à qui on a pris son veau marquent le temps.

Le temps s’installe dans un sentiment d’éternité. La fraîcheur de la nuit m’enveloppe progressivement.

Pourtant, dans l’immobilité apparente, lentement des changements se sont produits, invisibles à l’œil du spectateur.

Sur la lune, les quelques traces de nuages se sont complètement dissipées. Le ciel est lisse, parfaitement uniforme.

La brume s’est enflée. Elle a gagné l’ensemble du vallon. Progressivement, elle se glisse, contourne la colline. Lentement, une nappe plus claire s’installe comme une mer, écrase le paysage. La colline est devenue amas sombre, aux contours mal définis, émergeant d’un léger nuage de brume. On croirait voir une aquarelle en noir et blanc.

Evolution lente. Progressivement, la lumière de l’aurore remplacera cette clarté. Dans quelques heures il fera jour. L’astre solaire aura remplacé l’astre lunaire sans que le spectateur silencieux n’ait pu définir le moment où le changement aura eu lieu.

Un coq chante au loin, bientôt un autre lui répond, suivi par un troisième. J’entends un aboiement de chien, un klaxon de voiture dans le lointain. Bientôt le matin


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